Après leur extermination, et l’appropriation de leurs terres, les Cathares d’Occitanie trouvèrent refuge en Corse. C’est le dernier chapitre méconnu de la croisade Albigeoise, qui lie le destin des Corses et des Occitans au sein du continuum colonial Français. Les chjam’ è rispondi résonnent avec la sensibilité dialogique des troubadours et leur partimen. De même, on trouve une affinité entre planh et voceru, ou l’esthétique sacro-profane des mélodies troubadours et de la paghiella.
Notre programme pour Pigna est donc centré sur le chant Corse et les trobairitz, femmes de l’Occitanie médiévale dont la musique est presque entièrement perdue. Leurs chants nous parlent d’amour et d’altérité, d’une société plurielle, d’un peuple tourné vers la Grèce et l’Orient. La croisade Albigeoise effacera cette culture singulière, et encore aujourd’hui ce répertoire souffre d’une approche figée dans les croyances et pratiques institutionnelles du XIXe siècle. Nous voulons aussi inclure le chant vieux-romain, rare témoin d’une tradition orale particulièrement ornée datant de l’antiquité tardive. Il est un socle important à la compréhension des traditions sacrées et séculaires d’Occitanie et de Corse. Ce chant nous amène à l’aube d’un Christianisme encore pétri d’influences multiples qui est en résonance avec les sensibilités Cathare et Corse.
En trouvant des formules, principes d’intonation et d’ornementation dans le chant vieux-romain, les traditions Corses et les traités médiévaux, nous voulons développer une approche en accord avec l’identité de l’Occitanie médiévale, et mettre ces régions en dialogue.
